mardi 11 juin 2013

1471.Ep6. Escapade méditerranéenne.

Jean Il d'Aragon, allié surprise du Téméraire mais ennemi attendu de Louis XI qui lui a confisqué le Roussillon et la Cerdagne 
La fin de l’été 1471 trouva Yann de Ranrouêt à Lisbonne où il reçut un message de François II l’informant d’un possible conflit entre la France et la coalition bourguignonne. L’ordre du duc le laissa sans voix. Naviguer dans la méditerranée était compliqué, en fait, quasi-impossible car il ne possédait ni les pilotes ni les portulans nécessaires. Il ne savait absolument pas où il pourrait ravitailler en vivres et en eau. Enfin, ses navires avaient besoin d’un carénage important qu’ils ne pouvaient recevoir qu’au Blavet. Il prit donc quelques précautions. Dans un message, il répondit et décrivit sa situation au duc, déposa ses parts de butin chez un agent des Médicis et il confia son courrier et une copie de son journal de bord à un navire breton de passage contre une somme rondelette. Mais, il fallait obéir. Il mit quatre jours à trouver des pilotes pour trois de ses navires. Le 29 septembre, jour de la St Michel, il mit les voiles pour la méditerranée. Ils y pénétrèrent le 11 octobre et remontèrent lentement vers le nord pour atteindre les côtes de Provence. Yann espérait faire escale dans un port français et y faire campagne. Malheureusement, les mois d’automne en Méditerranée n’ont rien de clément pour les lourdes caraques. Entrecoupés de courts jours de vent portant, les orages et les calmes plats se succédaient. Le moral des bretons diminuaient. Ils apprirent en mer d’une galère génoise que la France et la Bretagne étaient en guerre contre l’Aragon, l’Angleterre, la Bourgogne et la Savoie. Les marins remarquèrent que les prises potentielles, des galères, les fuyaient aisément et allaient se réfugier dans le premier port venu grâce à leur avirons qui leurs permettaient d’échapper au période de calme. Elles étaient bien plus agiles que les grosses caraques de Yann qui se mit à prier de ne pas rencontrer la flotte de guerre de l’Aragon. Heureusement, en septembre, celle-ci se trouvait sur les côtes de Provence qu’elle razzia consciencieusement. Mais faute d’adversaire, elle s’était repliée sur Barcelone assiégée dont elle bloquait l'accès à la mer. Or, le pilote portugais les avait dirigés vers les Baléares pour éviter la côte aragonaise. Au bout d’un mois de mer, ils virent enfin les cotes de l’archipel. Yann fit aiguade sur une des petites iles puis fit voguer vers le nord pendant une journée. Le lendemain, un vent plein nord se leva et souffla régulièrement. A l’aube, Yann se décida et convoqua ses capitaines. Sa flotte fit demi-tour vers Palma de Majorque.
 

Dans le Roussillon, les garnisons de Louis XI tinrent pendant l’automne car l’armée aragonaise n’engageait que peu d’artillerie, réservée pour le siège de Barcelone. Le ban aquitain et languedocien vint leur prêter main-forte sous la direction du comte de Saint Pol, connétable du Luxembourg. En Savoie, l’offensive bourguignonne avait autant surpris les autorités savoyardes que les forces royales. Les garnisons furent rapidement renforcées par des Franc-archers et des émissaires partirent pour la Suisse et pour Milan. Les milanais ne bougèrent pas. Les agents du roi recrutèrent une dizaine de milliers de mercenaires à Genève qui vinrent à Lyon. En novembre, l’armée aventurée à Nîmes se scinda en deux. La partie la plus importante partit vers le Roussillon tandis que l’autre retourna à Lyon. A noël, la nouvelle de la trêve entre le Téméraire et Louis XI fit la joie de tous les lyonnais. Elle ne réjouit aucunement les Savoyards ni les Aragonais qui se retrouvaient seuls face à louis XI. Ils s’empressèrent d’envoyer des plénipotentiaires. Si les troupes en Dauphiné ne bougèrent pas, celles du Connétable de Luxembourg poursuivirent escarmouches et raids jusqu’en janvier sans succès.

A Palma de Majorque,  le 12 novembre, le mistral s’était mis à souffler et les pêcheurs avaient décidé de rester au port pour la journée. Ils rafistolèrent leurs filets puis se mirent à caréner leurs barques. Les officiers des deux galères du port sortirent tard et retournèrent vite à leurs occupations lançant leurs sous-fifres s’occuper de la chiourme. Yann regarda les tours du port puis ses sept caraques qui se dessinaient à l’horizon. Il avait pris place dans la caravelle et était parti en avant pour prendre d’assaut une des tours du port. La Ste Anne d’Auray battait pavillon aragonais et paraissait poursuivie par sept navires portant fleur de lys. Un cri d’alarme retentit et le pilote portugais embarqué contre son grès répondit en bon castillan sous la menace d’un couteau. La caravelle arriva à toute allure dans le port et s’écrasa contre le quai. Les franc-archers en jaillirent , ils filerent vers les tours dont ils tuèrent les occupants. La chaîne fut coulée et deux caraques négocièrent la passe sur leurs lancées. Les autres jetèrent l’ancre et mirent des chaloupes à la mer. Sachant qu’il n’avait pas les moyens de tenir la ville, Yann de Ranrouêt lança ses troupes à l’assaut des galères dont il libéra les rameurs. Bagnards et esclaves musulmans se jetèrent sur la ville comme de loups affamés tandis que les bretons se rassemblèrent pour contrôler le port et les rues qui y menaient. S’ils vidèrent quelques maisons et entrepôts, ils entreprirent surtout de remorquer les caraques et les deux galères hors du havre. Les bagnards firent assez de dégâts dans la ville pour que la garnison reste occupée le temps de l’opération. Yann fit alors mettre le feu dans les deux tours du port avant de partir. Ravitaillée et victorieuse, la flotte vogua vers le sud-est pendant une journée puis vers le nord-est, la Corse et la Provence avec une cinquantaine de bagnards qu’on avait remis aux avirons. Le soir même, dans Palma de Majorque, la garnison et les troupes du Château de Bellver mirent fin à la révolte à coup d'épées et de hallebardes.

Yann de Ranrouët passa noël à Aigues - Morte. Il y avait vendu sa caraque la plus abimée et une des galères. Lorsqu’il apprit le début de la trêve entre France, Aragon et Savoie. Il décida de reprendre la mer au printemps et de retrouver l’atlantique. Il espérait avoir autant de chance en 1472, mais il n'y croyait pas.

 
La construction du royaume d'Aragon, source Encyclopédie Universalis.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire