vendredi 28 juin 2013

1475. Ep2. Temps de paix en Bretagne.


François II vit la paix arrivée avec soulagement car l’énorme effort maritime qu’il avait entrepris commençait à peser sur ses finances et sur la population. L’armement de 50 navires avait prélevé une si forte partie de la population de pécheurs que la pêche, les sécheries et le commerce maritime avaient connu leur première baisse d’activité depuis les réformes de Pierre Landais. André de Lohéac restructura la marine bretonne par soucis d’économie et parce que Louis XI ne continuerait pas à financer une flotte aussi importante en temps de paix. Il diminua le nombre de navires en escadre à 20. 16 carvels et 4 caravelles se répartirent en deux escadrons, le premier à Morlaix et le second à Port-François qui resta le premier centre de ravitaillement et de construction des navires du duc. Le trésorier des Guerres vendit les plus endommagés et les plus anciens aux enchères à Nantes et Morlaix. Les agents de Jean de Rohan en acquirent cinq qui complétèrent la flotte embryonnaire du prince-marchand de Bretagne. Les acheteurs malouins cherchaient eux des navires armés car ils avaient obtenus du Sire de la Mer, le droit de s’armer en corsaire pour des nations étrangères. C’est ainsi que Jacques Danycan repartit en Irlande avec une dizaine de bâtiments malouins. La Notre Dame du Lac connut un sort plus funeste. Décortiquée par les charpentiers de Port-François, elle ne fut remontée qu’en 1477 et finalement, vendue. Yann de Ranrouët conserva le commandement de la Grande Escadre dite aussi escadre du ponant tandis que Quelennec le Jeune garda celui de l’escadron de Port-François. La Grande Escadre perdit nombre de navires anciens et ne se composa plus que de 12 carvels et de 3 caravelles à partir de 1475. André de Lohéac décida de maintenir les 8 caravelles garde-côtes pour lutter contre la contrebande en Manche.
Le retour des marins permit de réarmer de nombreux navires marchands et bâtiments de pêches dés l’été et les échanges avec les Flandres et la péninsule ibérique reprirent rapidement. Les navires bretons étendirent leurs rayons d’action jusqu’à Hambourg et jusqu’à la méditerranée. Si la Hanse dominait la Baltique, si les Anglais conservèrent l’avantage dans leurs relations avec les Flandres, les Bretons supplantèrent les autres nations dans le domaine du transport atlantique de marchandises. Seul, le Portugal maintient un commerce florissant autour du sucre de ses iles atlantiques. L’Irlande, encore en guerre avec les Anglais, entra directement dans le commerce breton. Rohan y écoula des armes et des canons tandis que les négociants de Morlaix y vendirent en priorité du vin, du sucre et du blé en surplus en Basse- Bretagne. Ils ramenèrent de la laine, des plants de lin et des peaux. Les plants de lin connurent un grand succès en Bretagne en raison de leurs faibles couts par rapport à ceux de la baltique. Pendant un temps, la laine approvisionna les ateliers de draps autour de Rennes et Vitré mais elle était trop concurrencée par la production de l’élevage breton qui se développait sur les terres incultes. Ainsi, la laine et les peaux d'Irlande disparurent rapidement du marché breton. Enfin, les malouins y trouvèrent un terrain de chasse idéale sous les ordres de Jasper Tudor avec la bénédiction du duc et du roi de France.


La Forteresse d'Ancenis, complétée en 1484, fut creusée dans la rive de la Loire et les parties vulnérables aux boulets construites en briques qui absorbaient mieux le choc des boulets de métal.
La diminution des dépenses militaires permit au duc de s’atteler à de nouveaux projets. En mai, il décida en son conseil de guerre de rénover les défenses de châteaux de sa marche avec la France. Il s’agissait de changer le dessin des forteresses pour adapter tours et murs à l’usage de l’artillerie. François II prit alors deux décisions qui changèrent la Haute - Bretagne. Il imposa une nouvelle architecture des forts avec des tours plus basses, semi-enterrées, aux murs doublés en épaisseur et capables de supporter deux à quatre pièces d’artillerie tirant en enfilade. Deuxièmement, il décida de rénover les routes de Bretagne pour faciliter le transport des pierres nécessaires aux nouvelles constructions et l’approvisionnement des forteresses. Ancenis et Fougères seraient les deux premières cités à profiter de ces innovations. Il exonéra les transports de pierres de tous péages et de toutes taxes vers ces deux destinations à condition qu’elles proviennent de carrières bretonnes.





Les nouveaux murs de Fougères complétées en 1487. le talus à gauche fut obtenu par le creusement des fondations et des douves.
Allié de la France contre le Téméraire, François II ne se préoccupait pas de la réaction de Louis XI concernant ces deux forteresses. S’il avait obtenu le contrôle des iles anglo-normandes jusqu’à la paix, les agents du duc l’avaient informé de l’opposition des parlementaires parisiens à l’enregistrement du traité d’Angers. Or, depuis février, Louis XI n’avait pas obligé son parlement à officialiser ce traité. Connaissant le pouvoir du roi de France et sa volonté implacable de le faire appliquer, François II comprit rapidement qu’il s’était fait berner par le résident de Plessis-lès-Tours. C’est ainsi qu’il exigea une petite hausse des tarifs de recrutement de ses mercenaires en août lorsque les trésoriers du roi vinrent recruter les Bandes du Léon et de Cornouailles. Cette petite vengeance ne mena à rien. Le jour de la St Michel, au dernier jour des Grands Jours de Rennes, François II annonça la transformation de cette cour de justice en Parlement.

Jean II de Rohan fut bien aise à l'automne quand sa femme lui apprit qu'elle était enceinte. Yann de Ranrouët, seigneur de Noirmoutier, vice-amiral de Bretagne le fut aussi quand il épousa la fille de Guillaume Chauvin, Isabelle, de 10 ans sa cadette. Ses témoins furent André de Lohéac et son ami Rohan. Enfin, Pierre Landais apprit que son fils se mettrait sur le chemin du retour à la nouvelle année. Son grand projet allait prendre forme.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire