Charles le Téméraire, hiver 1476. Partie du dernier portrait fait en la ville de Malines. |
Charles le Téméraire atteignit la capitale lorraine au début
de l’été. Dés son arrivée, il reçut les échevins pour obtenir la reddition de
la ville. Pendant deux heures, il tempêta et menaça les notables de la cité
montrant à tous que ses précédents échecs à Neuss, Grandson et Morat avaient
renforcés son impatience et son intransigeance. Le visage rouge de colère du
duc ne faisait plus le même effet que trois ans plus tôt. Son prestige, son
armée et sa fortune avaient disparus au-delà du Juras dans les poches des
Suisses. Charles s’était entêté pour remonter une armée. Engageant
le tout venant, vidant les prisons, ses navires et les rues mal famées de ses
états, il avait rassemblé 10000 hommes inexpérimentés, mal armés et
indisciplinés. Si Charles voyait en eux les dignes descendants de ses
flamboyantes compagnies d’ordonnance, ses capitaines désespéraient de cette
racaille incapable, juste bonne à piller, violer et détruire les territoires
lorrains. Sans artillerie, son armée qui avait peinée à atteindre Nancy en bon
ordre, comptait sur le temps pour obtenir la reddition de la ville et sur les
moissons pour se réapprovisionner. Echevins et Officiers de Nancy comprirent
vite que ce siège tournerait en leur faveur. La garnison était forte,
approvisionnée et déterminée. L’encerclement n’était qu’imparfait et leur duc s’activait
pour leur porter secours. En effet, à Strasbourg, René de Lorraine rassemblait
une armée d’Alsaciens et de Suisses tandis qu’il lançait ses mercenaires bretons
sur les arrières du Téméraire. Pierre du Pont-l’Abbé, s’en prit tout l’été aux fourrageurs
de Bourgogne et réussit à deux reprises à détourner vers Nancy des
convois bourguignons capturés. Rapidement, la situation de Charles se
détériora. En raison des escarmouches et de la promiscuité, le nombre de blessés
et de malades augmentait chaque jour tandis que l’argent et le ravitaillement
se faisaient rares si bien que les désertions se multiplièrent. A la fin aout,
Charles n’avait plus que six milles hommes tandis que René passait les Vosges à
la tête d’une armée de 14000 professionnels en majorité bretons, suisses et
alsaciens.
Les historiens de la période accordent aujourd’hui entre
4000 et 5000 hommes à l’armée du Téméraire quand il rangea son armée en
bataille le 5 septembre. Au nord, il s’appuyait sur une forêt tandis qu’au sud
un marais protégeait son flanc. Charles attendait l’assaut des Suisses et plaça
en réserve ses dernières compagnies d’ordonnance. Lorsqu’il découvrit ce
dispositif, René et ses capitaines décidèrent de reprendre la recette de
Morat : une attaque de flanc à travers les bois et une diversion face à la
position bourguignonne. Une nouvelle fois, ce plan marcha parfaitement et le moral des défenseurs
s’écroula rapidement. Sentant ses troupes vacillées sous la pression des Suisses,
Charles décida de jouer le tout pour le tout et il chargea à la tête de ses
gendarmes d’ordonnance. Mal lui en prit. Ce qui n’était arrivé ni à
Morat, ni à Grandson arriva ce jour-là. Le duc fut jeté à bas de son cheval par
les Suisses qui ne lui firent point quartier. Sa mort déclencha la panique
et les Bourguignons fuirent vers le Sud, vers le marais où Suisses, Bretons, Alsaciens et Lorrains firent grand massacre des piétons du Téméraire. Le soir même, Nancy feta son duc.
René de Lorraine et Pierre de Pont L'Abbé constatent la mort du Téméraire dont le cadavre a été dépouillé par les mercenaires suisses. |
Dés la mi-septembre, René était redevenu maître en son duché.
Contrat rempli, Pierre du Pont l’Abbé et les Bretons prirent le chemin de l'ouest,
bourses pleines de pillages et des derniers deniers du Duc de Lorraine. La nouvelle de la
mort de Charles le Téméraire se répandit à la vitesse d'un cheval au galop dans toute
l’Europe. Le Grand Duc d’Occident n’était plus. A Tours, Louis XI sauta et
dansa de joie à la grande surprise de Philippe de Commynes. A Londres, Edouard IV s’inquiéta de la perte d'un allié. A Vienne, l'Empereur convoqua ses diplomates et son fils Maximilien tandis qu’à Gand, Marie, Duchesse de Bourgogne de 18 ans, se désespérait.
Sans armée, sans argent, la Bourgogne était bonne à prendre.
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