L’année 1466 vit la Bretagne s’engager dans un vaste effort diplomatique. Le duc envoya des représentants en Angleterre, Aragon, Bourgogne, Castille et au Portugal à la recherche de soutien pour sa politique. L’ambassade en Castille n’aboutit pas à cause de l’indécision de son monarque et elle poursuivit son périple vers Rome où elle n’arriva qu’en décembre 1466 en raison de frictions avec les aragonais. Les relations cordiales avec le Portugal furent renforcées par un accord qui permit aux bretons de s’immiscer dans le commerce du sucre vers l’Europe du Nord en échange d’un accès privilégié aux Créés. Les toiles de lin du Léon plaisaient aux ibériques car fines et aérées, elles permettaient de supporter la chaleur estivale de la péninsule. Le sucre acheté à Lisbonne puis transporté par des navires bretons, était vendu à Nantes, Bordeaux ou Anvers. Dans ce dernier port, des marchands de Morlaix contactèrent la Hanse pour obtenir un approvisionnement régulier en graines de lin de la baltique nécessaires pour maintenir des récoltes et un tissu de qualité. Ces contacts commerciaux aboutirent au contrôle par les bretons d’une partie du transit nord-sud de l’Europe et d’une grande partie du cabotage sur les côtes françaises. En Angleterre, les représentants du duc demandèrent à Edouard IV d’arrêter les pirates anglais qui pullulaient en Mer du Nord et dans la Manche. Ils reconduisirent aussi la trêve qui existait depuis deux ans.
Edouard IV, chef du parti Yorkiste dans la guerre des deux Roses. |
Malheureusement, la piraterie ne s’arrêta pas et les pertes navales de l’été furent importantes dans les deux pays car l’Amiral de Bretagne, Jean II de Quelennec vendit un nombre important de lettres de marques et de représailles. L’entrée en vigueur de la réforme navale de François II permit une augmentation du nombre et de l’efficacité des corsaires bretons. En septembre, les principaux pirates anglais avaient été pris et la pratique du convoi adoptée. Les navires bretons ne remontaient la Manche qu’en groupe de quatre à cinq navires armés. Pourtant, la piraterie restait endémique en Europe du Nord. Si les relations avec le Comte de Charolais était excellente, celles avec le duc de Bourgogne étaient guère aimables. Philippe Le Bon, soucieux de ne pas agacer le roi Louis XI, refusait toute alliance officielle car il voulait le calme sur sa frontière française. En effet, la principauté de Liège était en état de rébellion contre son duc. Si Le duc Philippe et les Liégeois arrivèrent à un accord à l’automne 1465, le Comte de Charolais exclut Dinant du traité car les habitants l’avaient insulté, lui et sa mère. Les milices dinantaises continuèrent donc de rançonner et de ravager le comté voisin, celui de Namur et en particulier les alentours de la ville de Bouvigne. En juillet, Charles le Charolais et Philippe le Bon rassemblèrent l’armée et marchèrent sur la ville qu’ils mirent à sac, le 25 aout. A l'automne, l'ambassade attendait toujours la décision du duc Philippe.
En France, le duc de Berry contrôlait à peine son nouveau duché. Les bonnes villes de Basse- Normandie étaient ulcérées par les pillages bretons. Incapable de les payer et de les ravitailler, le duc de Berry les laissa rançonner les territoires qu’elles contrôlaient pendant l’hiver et le printemps. S’il réussit à les démobiliser à la St Jean, les garnisons ne s’en allèrent pas les mains vides et firent maints détours avant d’arriver à Avranches. Charles de Berry perdit ainsi le peu de crédit qu’il avait dans la province. En réalité, à part la ville de Rouen et la vallée de la Seine, Charles de Berry ne gouvernait rien. Dés l’hiver 1465, Louis XI avait infiltré agents et argent dans la province. Petit à petit, les villes se rallièrent à sa cause si bien qu’à l’automne, le roi contrôlait la région. En octobre, lorsqu’une troupe française parcourut la basse - Normandie, elle fut accueillie avec soulagement. A son approche, Charles de Berry s’enfuit de Rouen en Novembre et préféra passer en Bourgogne.
Philippe Le Bon, duc de Bourgogne et père de Charles de Charolais |
Chicanerie parlementaire. Jean de Penthièvre sortit de l’antichambre du roi de France le sourire aux lèvres. Il avait obtenu le soutien de Louis XI dans sa querelle avec le duc de Bretagne. Refusant de participer à la ligue du bien public, Jean avait assisté son suzerain français pendant toute la révolte et continuait à soutenir le roi contre son frère Charles. En mai 1465, le duc de Bretagne l’avait condamné pour félonie et avait confisqué ses fiefs de la côte nord. A Etampes, malgré les appels à la clémence de Louis XI, le duc de Bretagne n’avait pas cédé. Irrité par les suppliques et les tergiversations royales dans les négociations, François II, sûr de son bon droit, exigea de conserver les revenus obtenus pendant la confiscation mais aussi que Jean de Penthièvre se rende en habit de pénitent à Nantes pour lui répéter son hommage-lige. Après quelques discussions avec des officiers royaux, Jean de Penthièvre, refusant de s’humilier, déposa une plainte auprès du Parlement de Paris pour casser le jugement du duc de Bretagne. Louis XI sauta sur cette occasion d’affirmer la supériorité de la justice royale sur celle du duc, son vassal.
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