L’arrivée de Charles de Berry en Bourgogne posa un problème à Philippe Le bon. Vieux, fatigué et malade, il voulait assurer une succession paisible à son fils et cela nécessitait une baisse des tensions entre la France et son duché. Louis XI envoya des diplomates dés février pour récupérer l’héritier du Trône. Vivant à Genappe, Charles de Berry recevait régulièrement la visite de l’héritier de Bourgogne qui l’acquit à ses vues. Charles de Charolais exigea qu’on confie à Charles de Berry la Champagne comme apanage. En mars, Louis XI refusa car ce duché aurait été voisin des terres bourguignonnes et bien trop proche de Paris. Alarmé par les contacts réguliers entre la couronne d’Angleterre et les bourguignons, Louis XI fit reprendre les négociations et invita François II à venir lui rendre visite. Le duc accepta une rencontre de quatre jours à Ancenis. Louis XI y déploya tous ses stratagèmes diplomatiques. Il le charma, le cajola, l’étourdit de fêtes, de chasses et de plaisirs. De quatre jours, le rendez-vous devint un séjour de trois semaines. Pour finir, il l’acheta. Lors de la Pâques, Louis XI signa une alliance défensive avec la Bretagne par le traité d’Ancenis et obtint le droit de recruter les bandes pendant 3 ans. Cette alliance lui coûta peu : 300000 livres et un noble d’origine bretonne fort mécontent, Jean de Penthièvre. Il avait assuré ses arrières. Pendant ce temps, les négociations avec les Bourguignons se poursuivaient. En mai, Le roi proposa à Charles de Berry la Guyenne. Mais, sur les conseils de Charles de Charolais, Berry refusa. Le roi de France prit aussi contact avec les habitants de Liège et passa un accord avec eux contre la Bourgogne. A l’annonce de la mort de Philipe Le Bon, le roi entreprit de mobiliser son armée et de la concentrer au nord de Paris et dans l’orléanais. Au passage, comme il détenait de nouveau le titre de comte d’Etampes, il expulsa l’administration bourguignonne qui gérait ce comté et le rattacha au domaine royal. Pendant le reste de l’année, il attendit l’attaque bourguignonne tout en contrecarrant la diplomatie du duc Charles par des ambassades vers l’Aragon, la Castille, le duché de Milan, les cantons suisses et surtout l’Angleterre. Les missions outre-manche furent un échec et l’Angleterre bascula peu à peu dans le camp bourguignon.
Le 15 juin 1467, Charles de Charolais devint Duc de Bourgogne, de Brabant, de Limbourg, de Luxembourg, Marquis de Namur, Comte d’Artois, de Flandres, de Hainaut, de Hollande, et de Zélande, Comte Palatin de Bourgogne. Son domaine s’étendait des côtes de la Frise sur la Mer du Nord au contrefort des Alpes suisses mais ne formait pas un ensemble continu car il était séparé par le duché de Lorraine. Né dans le palais familial de Dijon, Charles tenait sa cour dans la ville de Bruxelles et rêvait de devenir roi. Les ducs précédents avaient d’ailleurs développé un protocole compliqué pour manifester leur pouvoir politique et leur puissance financière. Le contrôle des Pays-Bas leur donnait accès aux richesses de la seconde région la plus riche d’Europe par son commerce et son industrie textile. Mais les Hollandais et les Zélandais étaient jaloux de leurs libertés. Le Duc devait donc demander aux Etats de ces territoires les finances nécessaires à sa politique. Ainsi, ses moyens étaient limités et ses pays disposaient d’une autonomie importante qui favorisait leurs activités économiques mais aussi leurs volontés d’indépendance. Le duché de Bourgogne était un Etat puissant mais fragile, régulièrement parcouru de révoltes citadines réclamant le maintien de leurs droits. Incitée par le roi de France, la principauté de Liège se révolta dés qu’elle apprit la mort de Philippe le Bon. Elle cherchait à retrouver son indépendance car en 1465, elle était devenue un protectorat bourguignon. Charles mit du temps à réagir car il parcourut ses différents domaines pour se faire reconnaitre duc et obtenir les hommages de ses vassaux. Il en profita pour récolter les fonds nécessaires à sa campagne militaire. Il écrasa le 28 octobre les Liégeois à la bataille de St Trond. Le 11 novembre, la principauté se rendit et fut intégré dans les territoires bourguignons. Cette période de conflit interne obligea Charles à réformer son armée. Il la transforma en suivant le modèle français tout en y intégrant une portion importante de mercenaires (dont des Bretons). Cette période lui permit aussi de finaliser les discussions portant sur son troisième mariage. Ses deux premières femmes étant mortes, en l’absence d’héritier légitime, le duc devait se trouver une épouse. Dés février, il avait envoyé des représentants à la cour des Habsbourg, en Angleterre, en Castille, à Milan et dans les principautés allemandes. C’est d’Angleterre que vinrent les réponses les plus prometteuses. Espérant sceller une alliance contre la France, le duc de Bourgogne demanda la main de Marguerite d’York, sœur d’Edouard IV d’ Angleterre.
Edouard IV sollicita l’alliance bourguignonne car la situation dans ses territoires devenait de plus en plus instable. La plupart des nobles anglais qui s’étaient ralliés à lui n’avaient accepté que du bout des lèvres son mariage de 1464 avec Elisabeth Woodville. A partir de cette date, le roi favorisa très nettement cette famille de noblesse récente alors qu’elle n’avait eu qu’un rôle très secondaire dans sa montée sur le trône. Les nombreuses révoltes lancastriennes freinèrent les malcontents yorkistes. Mais la sécurisation du royaume à partir de 1465 entraîna la radicalisation de l’opposition. Ulcérée par le mépris des francophiles Woodville et par l’indifférence du roi qu’elle avait mis sur le trône, la famille Neville menée par le Comte de Warwick, dit « le faiseur de rois » manifesta de plus en plus ouvertement son désaccord. Le comte reçut le soutien du plus jeune frère d’Edouard IV : Georges, duc de Clarence. En été, la proposition de Charles le Téméraire permit au roi de calmer temporairement le climat politique et de rallier à sa cause les francophobes et ceux qui voulaient retrouver l’Angleterre forte et puissante des Plantagenets. Ils espéraient que le roi reprendrait l’offensive contre le royaume de France. Edouard IV reçut aussi une ambassade bretonne et entama des discussions politiques et économiques dans l’espoir de former une alliance. L’ambassade était encore à Londres le 31 décembre.
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Avril 1467. Louis XI et François II sur les bords de Loire. |