Gabrielle de Bourbon-Montpensier, cousine de Louis XI, descendante de St Louis, conjuguait un amour des arts et une piété fervente. |
Les ouvertures de Guillaume Chauvin avaient porté leurs fruits. Gabrielle de Bourbon-Montpensier et Marguerite de Foix étaient de bons partis issus de familles puissantes en terres, argent et prestige. Le cas de Marguerite, fille de la reine de Navarre, posait un petit problème. En effet, son père était en disgrâce dans le royaume de France. Louis XI le trouvait bien trop puissant et sapait systématiquement ses actions.. Au contraire, la famille de Gabrielle pouvait lier les Montforts aux Capétiens. Elle descendait directement de St Louis. Ce prestige et ce lien familial permettraient au duc de rester dans les bonnes grâces du roi au moment où Louis XI avait bien moins besoin de la Bretagne grâce à son alliance avec l’Angleterre. Pendant le mois de Janvier, Guillaume Chauvin dépensa beaucoup d’énergie pour que le duc choisisse Gabrielle tandis que Pierre Landais considérait que cette alliance allait contre les intérêts du duc. François II était sur le point de choisir la jeune Marguerite en raison de ses liens très proches avec la couronne de Navarre lorsqu’il reçut une lettre de Louis XI. L’appelant son cousin, Louis XI considérait que le mariage avec Gabrielle était affaire acceptée et annonçait qu’il avait obtenu des Penthièvres qu’ils lui vendent leurs droits pour le prix de 80000 livres. Cela sous-entendait que sans mariage, la vente ne se ferait pas. Le duc grogna, rala puis accepta et envoya Guillaume Chauvin négocier le contrat avec le comte de Bourbon-Montpensier. Il demanda pas moins de 80000 livres comme dot.
En mars arriva une ambassade inattendue du Portugal. François II espéra un moment obtenir la main de la sublime Jeanne du Portugal. Mais, l’ambassadeur venait avec un message et un coffre contenant assez de ducats pour louer un escadron de la flotte bretonne. Alphonse V du Portugal l’informait qu’il allait une nouvelle fois tenter d’envahir le Maghreb et d’en bouter les infidèles. Il avait donc besoin de tous les marins expérimentés qu’il pouvait trouver. Cette offre tombait à point nommé pour le duc car en raison de la paix, le roi de France ne finançait plus sa marine. De plus, les constructions navales de Jean de Quelennec et d’André de Lohéac lui coutaient fort cher. Cet accord permit de retarder les désarmements de navires d’une année. En avril, la flotte du Blavet mit voile pour Oléron où elle recueillit la garnison. Un escadron de 8 navires commandés par Yann de Ranrouët prit le chemin du sud tandis qu’André de Lohéac rentrait patrouiller la côte nord de la Bretagne ne laissant qu’un escadron de cinq caraques à Nantes. Quelennec le Jeune partait aussi vers le Portugal tandis que son père suivait de prêt la construction de deux caraques de guerre (des caravelles redimensionnées portant 24 canons) et assurait la direction générale de la flotte et son ravitaillement à partir des ports du Blavet, de Morlaix et de Nantes.
En avril, la Françoise, première caraque bretonne gréée en trois mâts quitta le port de Morlaix les cales pleines de crées. Jean de Rohan la regarda du quai. Après un hiver de scènes de ménage, il s’était rendu aux arguments de sa femme. Il ne voulait pas que toutes ses réformes disparaissent s’il décédait en mer avant d’avoir un héritier. Il planifia pourtant un voyage en Flandres pour l’automne. Nommé Gouverneur du Leon, du Trégor et du Penthièvre, le duc lui avait donné carte blanche pour y appliquer ses réformes. Ces trois pays allaient servir de bancs d’essai pour tout le domaine ducal. Jusqu’en mai, il parcourut le nord pour convaincre nobles et marchands de les appliquer. La prospérité que Morlaix affichait par rapport à ses rivales Tréguier, St Quai - Pontrieux et St Brieuc, lui permit de rallier les élites de ces régions. En mai, de retour à Rohan, il réorganisa ses forges vers une production plus militaire pour répondre à la demande des mercenaires et des troupes du duc.
Le 8 mai, les Penthièvres signèrent la renonciation aux droits de succession du duché après que Pierre Landais eut versé la somme demandée. Le 12 mai, Guillaume Chauvin rejoignit le duc et ses conseillers à Nantes. Il avait obtenu une dot de 100.000 livres payables sur cinq ans et le mariage avait été fixé au 21 juin en la ville de Nantes. Le duc reçut un message du roi qui approuvait ce contrat et qui annonçait sa venue. Il invitait aussi le duc à rejoindre son ordre de Chevalerie, celui de St Louis. Louis XI avait créé cette institution pour concurrencer le Téméraire et ses chevaliers de la Toison d’Or, mais aussi pour contrôler ses vassaux les plus puissants. François II refusa mais proposa que son bâtard François d’Avaugour puisse y accéder et ainsi mener carrière en France et en Bretagne.
Alors que les grandes familles de France et de Bretagne se dirigeaient lentement vers l’estuaire de la Loire, un jeune homme et ses cinq compagnons débarquèrent à St Malo. Connus des marchands de la ville, on leur prêta des chevaux et ils filèrent immédiatement au galop vers le sud-est. Alors, le tocsin sonna et la cité corsaire s’activa comme une ruche. Le soir même, trois navires quittèrent le port et voguèrent plein nord. Ils contenaient tout le ravitaillement que les malouins avaient pu rassembler et leurs équipages étaient armés jusqu’aux dents. Le 21 juin, à Nantes, si les mariés furent loués pour leur beauté, l’invité surprise occupa toutes les conversations. Louis XI et François II s’étaient isolés la veille avec lui. S’il fit bonne figure pendant la cérémonie, le jeune homme s’isola, incapable de supporter la frivolité de la fête après les deux terribles mois qu’il venait de vivre. Edouard IV avait repris le trône. Henri VI était décapité, Marguerite d’Anjou emprisonné, le Prince de Galles exécuté, Warwick six pieds sous terre et Jasper Tudor introuvable. Henri Tudor était arrivé en Bretagne.
Louis XI présidant la première réunion de l'ordre de St Louis. |
Henri VI, le roi "maudit" d'Angleterre. |
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